Dispositif anti-rapprochement et destruction de bien d’autrui
Publié le :
02/08/2023
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Cass. crim., 11 mai 2023, n°22-84.480
L’obligation de porter un dispositif anti-rapprochement a fait l’objet de nombreuses clarifications par la jurisprudence. La chambre criminelle de la Cour de cassation a de nouveau précisé, dans un arrêt rendu le 11 mai 2023 (n°22-84.480) l’étendue du recours à cette mesure.
Divorce, destruction de biens et interdiction de rapprochement
En l’espèce, un époux avait été condamné par le tribunal correctionnel pour l’incendie de la maison dont il était propriétaire avec son épouse, et de violences commises envers personnes dépositaires de l’autorité publique. Le juge de l’application des peines (JAP) avait notamment prononcé à son encontre une interdiction d’entrer en contact avec son épouse, avec laquelle il était en instance de divorce. Le procureur de la République avait par ailleurs demandé que celui-ci soit obligé de porter un dispositif électronique anti-rapprochement, ce que le JAP a refusé.Le ministère public a alors interjeté appel de l’ordonnance du JAP, puis formé un pourvoi en cassation suite à la confirmation de ce refus par ordonnance du Président de la chambre d’application des peines de la Cour d’appel de Besançon.
Précisions relatives au dispositif anti-rapprochement
La Cour de cassation approuve une partie des arguments formulés par le ministère public. Celui-ci fait en effet grief aux juges d’appel de ne pas avoir ordonné, en plus de l’interdiction de rapprochement de la victime, la mise en place d’un dispositif électronique anti-rapprochement. C’est sur ce point que la Haute juridiction est en désaccord avec les juges du fond.Elle précise en effet que l’article 132-45-1 du Code pénal prévoit que la personne qui se rend coupable d’une infraction punie d’au moins trois ans d’emprisonnement commise sur conjoint, concubin ou partenaire pacsé peut donner lieu au prononcé d’une interdiction de rapprochement (ce qui a été décidé en l’espèce.) Ce texte n’impose cependant à aucun moment que la décision de condamnation de l’auteur vise spécifiquement la circonstance aggravante que constitue la qualité de la victime. Or, dans cette affaire, les juges du fond exigeaient cette condition supplémentaire, qui n’était pourtant pas prévue par les textes.
La prise en considération des éléments spécifiques à chaque espèce
Si la Cour de cassation juge en droit, rien ne lui empêche de vérifier si les juges de première instance et d’appel ont basé leur décision sur d’autres considérations que la lettre de la loi pour justifier l’absence de recours à des outils visant à protéger les victimes.
Ainsi, si l’article sus-cité évoque la possibilité de mise en place d’un dispositif anti-rapprochement, celui-ci n’est pas une obligation. Par ailleurs, les juges du fond avaient pris en compte d’autres éléments : l’auteur des faits a été condamné à une interdiction de rapprochement, même si elle ne s’accompagnait pas d’un dispositif électronique spécifique ; le délinquant avait également déclaré qu’il allait vivre, à sa sortie de prison, dans une autre région que celle de la victime. Enfin, les circonstances de la commission de l’infraction permettent d’affirmer que l’incendie déclenché était une tentative de l’auteur d’échapper à son interpellation plus qu’une volonté de nuire à son épouse, qui avait déjà quitté le logement en question plusieurs mois auparavant. Ces éléments justifient que, bien que la Cour de cassation estime que l’arrêt critiqué manque de base légale, car il exige une condition non prévue par la loi, il n’y a pas lieu de prononcer la cassation.
Pour conclure, cet arrêt permet de préciser l’étendue de l’utilisation possible, mais non obligatoire, du dispositif électronique anti-rapprochement. Il s’agit également d’une bonne illustration du principe de personnalisation des peines : les peines s’adaptent à la situation de chaque individu, et le simple fait qu’il soit possible de les prononcer ne signifie pas que le magistrat en fasse une application systématique.
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